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vendredi 24 avril 2009

Il faut réguler les entreprises internationales.

A quoi sert-il de poser un régulateur de vitesse et de changer des plaquettes de frein sur un véhicule dont on ne bride pas le moteur ? En accélérant trop brusquement, le risque d'accident demeure important, surtout s'il n'y a pas de pilote ! C'est pourtant ce qu'a décidé le G20 à Londres en ignorant complètement un des acteurs essentiels du capitalisme : les entreprises internationales.

Celles-ci ont pourtant un rôle démesuré : rappelons simplement que le chiffre d'affaires des dix plus grosses entreprises du monde pèse plus que le produit intérieur brut (PIB) du Brésil et de l'Inde réunis. Face à cette puissance, les Etats du Sud - qui ne sont évidemment pas exempts de toute responsabilité - ne peuvent guère imposer leurs propres règles. La liste est longue des transgressions du droit du travail, des désastres écologiques et des pertes fiscales dans ces pays.

A l'approche des élections européennes du 7 juin, le CCFD-Terre solidaire et Oxfam France -agir ici interpellent l'Union européenne sur son rôle en matière de régulation des entreprises. Un objectif : rendre celles-ci réellement responsables de leurs impacts sociaux, environnementaux et fiscaux dans les pays pauvres. Nous demandons à la France et aux candidats au Parlement européen de porter des propositions de régulation et de transparence qui placeront les entreprises européennes à égalité en matière de « RSE+F » (responsabilité sociale, environnementale et fiscale des entreprises). Le « F » est essentiel, car la fraude fiscale d'entreprises internationales coûte chaque année plus de 125 milliards d'euros aux pays du Sud. Nous proposons de responsabiliser les sociétés mères pour les activités de leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs, sur lesquels elles exercent une influence notoire. Nous demandons que s'étende à l'Europe entière l'obligation, pour chaque société, de publier un rapport sur ses impacts sociaux et environnementaux, et de rendre des comptes sur les bénéfices et les impôts versés dans chaque pays où elles opèrent. Nous suggérons, enfin, la création d'un registre européen identifiant les propriétaires véritables de chaque entité juridique.

L'Union européenne doit montrer l'exemple en matière de régulation internationale. Elle a les moyens d'imposer des règles communes puisque la plupart des sociétés internationales opèrent sur son sol. La RSEF des entreprises pourra être ainsi appréciée par un public attentif, constitué d'investisseurs, de consommateurs et de salariés.

La responsabilité sociale des entreprises est devenue une thématique incontournable au sein des entreprises cotées. Une étude récente (1) souligne qu'une « bonne gestion de la RSE est vue comme un moyen d'assurer la pérennité de l'entreprise sur le long terme ». Les bénéfices en termes d'image, de prévention des risques et d'investissement ne sont plus à démontrer. Mais les effets sur les pays du Sud tardent à se faire sentir. Trop peu est fait sur la liberté syndicale, les salaires ou les horaires de travail. La responsabilité fiscale des entreprises est trop souvent occultée. Les multinationales reconnaissent elles-mêmes leur schizophrénie.

Cette nouvelle responsabilité est nécessairement transversale et ne peut reposer sur l'autorégulation par les entreprises. Une véritable régulation publique permettra d'augmenter l'utilité sociale des entreprises et de créer des richesses sans en détruire ailleurs. La sortie de crise passe par une économie durable plaçant l'homme et son environnement au centre des stratégies entrepreneuriales. Au coeur de cette démarche, l'Union européenne a un rôle de pilote essentiel.

Par Antoine Malafosse (délégué général du CCFD-Terre solidaire)

(Source "Les échos" : http://www.lesechos.fr/info/france/4857608-il-faut-reguler-les-entreprises-internationales.htm

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