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lundi 27 avril 2009

L'ère du secret bancaire est révolue, par Benoît Hamon


A l'heure où la plupart des dirigeants des pays occidentaux rivalisent de superlatifs pour professer qu'avec la crise financière « l'ère du secret bancaire est révolue » et qu'il faut « changer le système », le Parlement européen est, lui, passé aux travaux pratiques.

On estime chaque année le montant total de la fraude fiscale dans l'Union européenne à 200 milliards d'euros. Rapportée au budget de l'Union en 2008 (133 milliards d'euros) ou aux montants cumulés des déficits publics dans l'Union européenne, on comprend combien la perte de ces sommes colossales affecte les Etats membres. En effet, l'addition des plans de relance européens approche 1,5 % du PIB de l'Union, là où la fraude fiscale s'établit à 2 % du PIB. L'injection massive d'argent public pour sauver le système bancaire motive donc les Etats à réclamer de solides contreparties aux banques européennes pour recouvrer les recettes fiscales que le secret bancaire permet de leur soustraire. Ce contexte explique que j'ai trouvé une majorité au Parlement européen pour soutenir une politique ambitieuse de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, dont la portée dépasse la révision de la seule « directive épargne ».

Mon rapport propose à l'Union européenne de franchir une étape décisive dans trois domaines.

Le premier consiste à porter un coup direct au secret bancaire par l'abrogation en 2014 du système de retenue à la source encore appliqué par le Luxembourg, l'Autriche et la Belgique. En 2008, la France a reçu des pays pratiquant le secret bancaire 64 millions d'euros au titre des impôts dus sur les intérêts de l'épargne. 38 millions en provenance de la Suisse et 13 en provenance du Luxembourg, principales destinations européennes des résidents français pour leurs placements en épargne. Qui sont-ils ? Combien sont-ils ? Comment vérifier l'exactitude des sommes perçues. Cela échappe à Bercy comme à ses homologues de 24 des 27 Etats membres dont les ressortissants placent tout ou partie de leur épargne dans les pays de l'Union pratiquant le secret bancaire. Les parlementaires européens ont donc décidé que le système d'échange automatique d'information s'applique à tous les Etats. L'engagement de l'Europe à abroger le secret bancaire d'ici à 2014 est aussi un choix pragmatique qui place l'Union en position de force dans ses futures négociations avec la Suisse et tous les pays tiers qui accueillent aujourd'hui les milliards de l'évasion fiscale.

Le second acquis de ce texte porte sur le champ d'application de la directive. La fraude fiscale s'exerce la plupart du temps par personne morale interposée. Le champ de la directive a été élargi aux fondations et aux trusts derrière lesquels se cachent des personnes physiques cherchant à échapper à l'impôt. Le cas du Liechtenstein a illustré cette pratique mettant en scène une multitude de fondations factices abritant en réalité des contribuables allemands ou français indélicats. Au-delà de la question des supports juridiques à la fraude, la définition des produits financiers qui entrent dans le champ de la directive a fait aussi l'objet d'un âpre débat. L'ingénierie financière est sans limite dès lors qu'il s'agit d'inventer de nouveaux produits qui permettent notamment d'échapper à l'impôt. C'est pourquoi ce rapport propose que la Commission puisse adapter par « comitologie » la définition des produits d'épargne à l'évolution des marchés dans ce domaine.

Le troisième acquis de ce texte n'est pas le moindre. L'Europe établit une liste sans précédent de paradis fiscaux ou centres offshore et de structures et entités juridiques suspectes. Contrairement à la liste du G20, le Parlement européen a notamment inscrit dans sa liste les Etats américains du Delaware et du Nevada. Mais la contribution du Parlement vaut principalement par les contraintes supplémentaires que nous imposons aux paradis fiscaux. Là où la Commission proposait une liste limitée de territoires et d'entités, le Parlement renverse la charge de la preuve. Il impose à ces juridictions de démontrer que toutes les personnes morales suspectes sont fiscalement transparentes. Ainsi l'Union européenne se dote d'un instrument puissant de lutte contre la fraude fiscale qui renvoie aux paradis fiscaux le soin de faire la preuve de leur conformité avec les exigences de l'Union en matière de transparence fiscale.

Le Parlement a pris ses responsabilités. La balle est maintenant dans le camp du Conseil européen. Un député socialiste minoritaire en Europe a obtenu l'engagement du Parlement européen en faveur de l'abrogation du secret bancaire d'ici à 2014. Nul doute qu'un chef d'Etat conservateur majoritaire en Europe saura obtenir du Conseil un résultat identique.

Benoît Hamon, porte-parole du Parti socialiste.
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vendredi 24 avril 2009

Il faut réguler les entreprises internationales.

A quoi sert-il de poser un régulateur de vitesse et de changer des plaquettes de frein sur un véhicule dont on ne bride pas le moteur ? En accélérant trop brusquement, le risque d'accident demeure important, surtout s'il n'y a pas de pilote ! C'est pourtant ce qu'a décidé le G20 à Londres en ignorant complètement un des acteurs essentiels du capitalisme : les entreprises internationales.

Celles-ci ont pourtant un rôle démesuré : rappelons simplement que le chiffre d'affaires des dix plus grosses entreprises du monde pèse plus que le produit intérieur brut (PIB) du Brésil et de l'Inde réunis. Face à cette puissance, les Etats du Sud - qui ne sont évidemment pas exempts de toute responsabilité - ne peuvent guère imposer leurs propres règles. La liste est longue des transgressions du droit du travail, des désastres écologiques et des pertes fiscales dans ces pays.

A l'approche des élections européennes du 7 juin, le CCFD-Terre solidaire et Oxfam France -agir ici interpellent l'Union européenne sur son rôle en matière de régulation des entreprises. Un objectif : rendre celles-ci réellement responsables de leurs impacts sociaux, environnementaux et fiscaux dans les pays pauvres. Nous demandons à la France et aux candidats au Parlement européen de porter des propositions de régulation et de transparence qui placeront les entreprises européennes à égalité en matière de « RSE+F » (responsabilité sociale, environnementale et fiscale des entreprises). Le « F » est essentiel, car la fraude fiscale d'entreprises internationales coûte chaque année plus de 125 milliards d'euros aux pays du Sud. Nous proposons de responsabiliser les sociétés mères pour les activités de leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs, sur lesquels elles exercent une influence notoire. Nous demandons que s'étende à l'Europe entière l'obligation, pour chaque société, de publier un rapport sur ses impacts sociaux et environnementaux, et de rendre des comptes sur les bénéfices et les impôts versés dans chaque pays où elles opèrent. Nous suggérons, enfin, la création d'un registre européen identifiant les propriétaires véritables de chaque entité juridique.

L'Union européenne doit montrer l'exemple en matière de régulation internationale. Elle a les moyens d'imposer des règles communes puisque la plupart des sociétés internationales opèrent sur son sol. La RSEF des entreprises pourra être ainsi appréciée par un public attentif, constitué d'investisseurs, de consommateurs et de salariés.

La responsabilité sociale des entreprises est devenue une thématique incontournable au sein des entreprises cotées. Une étude récente (1) souligne qu'une « bonne gestion de la RSE est vue comme un moyen d'assurer la pérennité de l'entreprise sur le long terme ». Les bénéfices en termes d'image, de prévention des risques et d'investissement ne sont plus à démontrer. Mais les effets sur les pays du Sud tardent à se faire sentir. Trop peu est fait sur la liberté syndicale, les salaires ou les horaires de travail. La responsabilité fiscale des entreprises est trop souvent occultée. Les multinationales reconnaissent elles-mêmes leur schizophrénie.

Cette nouvelle responsabilité est nécessairement transversale et ne peut reposer sur l'autorégulation par les entreprises. Une véritable régulation publique permettra d'augmenter l'utilité sociale des entreprises et de créer des richesses sans en détruire ailleurs. La sortie de crise passe par une économie durable plaçant l'homme et son environnement au centre des stratégies entrepreneuriales. Au coeur de cette démarche, l'Union européenne a un rôle de pilote essentiel.

Par Antoine Malafosse (délégué général du CCFD-Terre solidaire)

(Source "Les échos" : http://www.lesechos.fr/info/france/4857608-il-faut-reguler-les-entreprises-internationales.htm

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vendredi 17 avril 2009

Let's make money, un film d'Erwin Wagenhofer

Après We Feed the World, film événement sur les dérives de l’industrie alimentaire, le réalisateur Erwin Wagenhofer revient avec un nouveau documentaire intitulé Let’s Make Money, une démonstration implacable sur les conséquences humaines, démographiques et écologiques de la dérégulation économique. Une fascinante plongée au coeur du système financier mondial.

C'est l'histoire de deux mondes qui s'interpénètrent sans jamais se rencontrer. Dans l’un, on ramasse du coton ou on casse du minerai, dans l’autre, on "fait" de l’argent. Entre les deux, une passerelle à sens unique, qu’empruntent les flux invisibles de la finance mondiale. Une frontière immatérielle et pourtant infranchissable, qui concentre entre les mains de 10% de la population mondiale 80% des richesses, et les sépare du reste de l’humanité.



Deuxième long métrage du réalisateur autrichien Erwin Wagenhofer, auteur de We Feed the World, film événement sur les dérives de l’industrie alimentaire dont nous avions déjà soutenu la sortie en en France en 2007, Let’s make money, dans les salles depuis le 15 avril et sélectionné au festival de Sundance, est une dénonciation de l’argent fou. Une démonstration implacable sur les conséquences humaines, démographiques et écologiques de la dérégulation économique, notamment sur les pays pauvres, un voyage à travers les folles dérives du capitalisme financier.


Une machine à produire des inégalités

Des mines d'or du Ghana aux banques londoniennes, des champs de coton du Burkina Faso aux gratte-ciel de Singapour, des bidonvilles de Madras aux plages de Jersey, le cinéaste s’attaque à l’opacité d’un système complexe dont il tente de démonter les mécanismes tortueux et de montrer toute l’iniquité.

«Je ne pense pas que l’investisseur doive être responsable de l’éthique,
de la pollution ou de quoi que ce soit que produise la compagnie
dans laquelle il investit. Ce n’est pas son boulot.
Son boulot est d’investir et de gagner de l’argent pour ses clients »
Mark Mobius, président de Templeton Emerging Markets.

Le film reflète, par sa construction, la juxtaposition d’univers que tout oppose, Nord et Sud, riches et pauvres, investisseurs et paysans, hommes d’affaires et enfants des rues... Il enchaîne plans-séquences et témoignages multiples, qui illustrent les risques d’une économie sans garde-fous et les méfaits du néolibéralisme triomphant : spéculation effrénée, investissements fictifs, chantage économique, évasion fiscale, surexploitation de la main d'oeuvre, pays du Sud ruinés par le protectionnisme occidental, privatisation des services publics, pollution...

Le vertige des chiffres

Il en montre aussi les aberrations. Dans l'industrie cotonnière, les subventions accordées aux agriculteurs américains empêchent les pays du Sud d’accéder au marché mondial et coûtent par exemple au Burkina Faso 80 milliards de dollars par an, un manque à gagner dont le montant est quatre fois supérieur à la somme que perçoit ce pays sous forme d'aide.

«Si nous ne créons pas un nouveau mode de répartition des richesses,
ce qui a abouti à la Seconde Guerre mondiale se reproduira sous une autre forme.
C'est une nouvelle ère de barbarie qui s'ouvrira »
Hermann Scheer, lauréat du prix Nobel alternatif et député allemand.

Autre scandale, on estime qu’actuellement plusieurs milliers de milliards de dollars dorment à l’ombre des paradis fiscaux où ils échappent à toute forme de taxe. Si cette richesse était imposée au taux très modéré de 30%, les gouvernements du monde entier toucheraient 250 milliards de dollars de recettes annuelles supplémentaires, qu’ils pourraient dépenser pour endiguer la pauvreté et atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement de l’ONU...

Au-delà du vertige procuré par de tels chiffres, le film de Wagenhofer cherche à interpeller le citoyen ordinaire, mais aussi le simple contribuable. Celui dont l’argent, une fois déposé en banque, est introduit dans le circuit monétaire international et contribue, sans qu’il le sache, à alimenter un système qui, à l’échelle du globe, ne profite qu’aux populations riches d’Etats privilégiés. Plaidoyer pour une redistribution équitable des richesses, ce film engagé est avant tout un bel hommage aux valeurs citoyennes de l’information.

  • Le dossier de presse, avec une interview du réalisateur (en PDF)

  • Trouvez une séance près de chez vous

  • Vous voulez en faire plus ?

  • Distribuez le flyer du film pour mobiliser votre entourage sur notre campagne Hold-up International : halte à l'impunité des entreprises ! Exemplaires à commander gratuitement au siège d'Oxfam France - Agir ici, auprès de Mélanie.

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    mercredi 15 avril 2009

    Les décisions du G20 : bilan et analyse

    Aide au développement

    Le G20 a annoncé l’injection de 1100 milliards de dollars dans l’économie mondiale, ce qui constitue en soi une mesure de relance budgétaire significative, qui passe notamment par le triplement des ressources du Fonds monétaire international (FMI).

    « Nous reconnaissons que la crise actuelle a un effet disproportionné sur les populations les plus vulnérables dans les pays les plus pauvres et sommes conscients qu'il est de notre responsabilité collective d'atténuer les incidences sociales de la crise afin de limiter les dommages à long terme sur le potentiel mondial » (G20, communiqué final)
    Le montant de l’aide destinée aux pays en développement pourrait atteindre 240 milliards de dollars, essentiellement sous forme de prêts. Oxfam International accueille avec une grande satisfaction en particulier le plan de sauvetage de 50 milliards de dollars en faveur des pays les plus pauvres, une mesure indispensable pour permettre à ces pays de surmonter la crise économique actuelle. Cette aide financière devra cependant être débloquée rapidement, dans des conditions avantageuse et sans aucune contrepartie dommageable.

    Bien que l'OCDE ait revu à la baisse le montant d'aide annuel que les pays riches doivent verser, qui passe de 50 à 41 milliards de dollars, Oxfam se félicite que le G20 ait renouvelé ses engagements en matière d’aide au développement, une décision qui ouvre de nouvelles perspectives pour faire pression sur les gouvernements. Les pays riches doivent maintenant tenir leurs promesses. Les données disponibles à ce jour indiquent que de nombreux pays du G20 sont largement à la traîne. Certains, comme l’Italie, ont même réduit leurs budgets d’aide.

    Réforme des institutions financières internationales (IFI)

    « Nous maintenons notre engagement antérieur d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement et de respecter nos promesses respectives de dons en matière d'aide publique au développement » (G20, communiqué final)
    Dans le cadre d'engagements conséquents en faveur de l’aide au développement, les montants considérables accordés au FMI et, dans une moindre mesure, à la Banque mondiale, mettent cependant en évidence la nécessité de réformer en profondeur les politiques et structures de gouvernance de ces deux institutions.

    A l’instar de la Banque mondiale, le fonctionnement du FMI accorde une influence considérable aux pays riches. A titre d’exemple, la Belgique et les Pays-Bas ont les mêmes droits de vote que la Chine. Le G20 a promis de réformer les structures de gouvernance de ces institutions, notamment en ce qui concerne la révision des quotas. Mais les documents publiés le jour du sommet fournissent peu de détails sur l’ampleur de ces réformes.

    D’autre part, si les réformes de gouvernance des IFI ont une importance incontestable, notamment pour accroître l’influence des pays en développement au sein des institutions, elles ne conduiront pas forcément à une évolution des politiques mises en œuvre par ces institutions, pourtant essentielle.

    Dernier bastion des politiques du consensus de Washington, le FMI s’est en effet toujours illustré comme un fervent défenseur de la déréglementation et du libéralisme, imposant des politiques d’ajustement structurel inadaptées aux pays en développement confrontés à la récession. Ce retour en arrière doit être évité à tout prix.

    Les paradis fiscaux

    « Tous les éléments qui font l’opacité du système financier international restent intacts dans les paradis fiscaux : les trusts anonymes, les sociétés écrans, les techniques de manipulation des prix et les mécanismes de blanchiment d’argent » (Global Financial Integrity, communiqué final)
    Les décisions prises lors du sommet semblent marquer un net progrès par rapport à la situation prévalant l’année dernière. Néanmoins, au vu des concessions consenties par de nombreux paradis fiscaux en matière de secret et de transparence au cours du mois dernier, il est regrettable que le G20 ne soit pas allé jusqu'au bout de son action. On peut craindre à présent que ces réformes aient une influence limitée, en particulier pour les pays pauvres qui perdent chaque année des milliards de dollars de recettes fiscales.

    Le communiqué du G20 annonce avec fierté la fin de l’ère du secret bancaire. Cette déclaration semble pour le moins exagérée, au vu des mesures énoncées dans le texte. Les chefs d’État du G20 promettent certes de "sévir" contre les paradis fiscaux, brandissant la menace de sanctions dont la liste est impressionnante, mais ces propositions accordent cependant une place insuffisante ou inexistante à plusieurs éléments essentiels dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale.

    Tout d’abord, elles ne font absolument pas référence à la création d’un système d’échange d’informations fiscales automatique au niveau multilatéral. Elles n’imposent pas non plus aux grandes entreprises de faire état de leurs bénéfices et des versements réglés pays par pays dans leurs comptes annuels vérifiés. Enfin, les listes de paradis fiscaux publiées peu après la conférence sont incomplètes ou bien reflètent seulement les promesses des administrations non coopératives en matière de respect des normes fiscales internationales.


    La réforme du système financier

    « D'importantes défaillances dans le secteur financier et dans la réglementation et la supervision financières ont été des causes fondamentales de la crise » (G20, communiqué final)
    Oxfam estime que le système financier international doit mettre en œuvre une meilleure régulation du volume et de la volatilité de l’endettement, des mesures pour stabiliser les taux de change, renforcer le contrôle des capitaux, contrôler les activités des paradis fiscaux et démocratiser les institutions de gouvernance financière existantes.

    Si le communiqué final du G20 accorde une place centrale aux mesures visant à renforcer la réglementation et la supervision financières, les dispositions envisagées restent vagues. Le G20 promet entre autres "d'élargir la réglementation et la surveillance à tous les instruments, institutions et marchés financiers importants au point de vue systémique". Cette disposition constitue une avancée majeure vers une réglementation globale, néanmoins chaque pays reste libre de déterminer ce qui revêt une "importance systémique".

    Les documents du G20 ne soulignent pas non plus la nécessité que les institutions financières ou les normes comptables internationales intègrent mieux les risques environnementaux et sociaux, ce qui compromet l’engagement visant à "atténuer les incidences sociales de la crise"


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    mardi 14 avril 2009

    Quand les Etats-Unis et le Royaume-Uni agissent comme des paradis fiscaux

    La vérité n’est pas toujours celle que l’on croit !

    La qualité principale d’un paradis fiscal est que le propriétaire ou le bénéficiaire des fonds ou des revenus qui transitent par un compte ne puisse jamais être identifié.

    La première condition pour éliminer ces paradis est donc que l’organisme financier qui ouvre le compte connaisse l’identité de ces propriétaires ou bénéficiaires. La seconde est de lutter contre l’anonymat des sociétés-écrans.

    Une enquête restée encore confidentielle menée « in vivo », par un enquêteur en contactant une cinquantaine de structures financières situées dans une vingtaine de pays vient de montrer que les pays les moins regardants étaient... les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.

    Dans ces deux pays, il est possible d’ouvrir des comptes sans avoir à fournir de pièces d’identité probantes. Alors que dans la plupart des pays classés par l’OCDE dans la liste grise des paradis fiscaux, tels que Suisse, Bahamas, Iles Vierges, Iles Caimans, etc ; il est absolument nécessaire de produire des pièces d’identité certifiées ce qui démontre que ces pays sont particulièrement attentifs en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et qu’ils cherchent à conserver la trace de leurs déposants.

    Qui plus est, pour déguiser l’origine des fonds et les soustraire aux prélèvements du fisc, il est courant de construire des sociétés écrans, qui vont par exemple facturer les prestations produites par de réels individus comme experts, conseillers, intermédiaires, artistes, et les accumuler dans un pays à fiscalité favorable. Ces sociétés accumulent ainsi les revenus hors fiscalité et les gèrent au profit de leurs véritables propriétaires.

    Là aussi, Grande-Bretagne et Etats-Unis se sont avérés, dans la pratique, être les deux pays avec le Canada, l’Espagne, le Belize et l’Uruguay à accepter de créer des sociétés écrans sans que l’identité des créateurs soit établie de façon probante.

    Pour couronner le tout, ces deux nations anglo-saxonnes ont depuis le moyen-âge développé une construction originale, le trust, qui permet à un fondateur de créer une structure juridique qui va administrer des biens au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires. L’intérêt de la structure a longtemps consisté dans son caractère perpétuel, de sorte qu’elle permette de parer à la fragmentation des transmissions patrimoniales et à la fiscalité qui y était assise. Par ailleurs en général les trois personnes clés de cette institution sont distinctes de par la loi : le fondateur, le ou les bénéficiaires et l’administrateur ou trustee. Mais actuellement dans certaines juridictions il est possible d’anonymiser les trusts (par exemple dans l’état de New York).

    De la sorte l’un des bénéficiaire peut parfaitement être le fondateur lui-même, tandis que la seule personne physique ou morale connue de l’extérieur et donc du fisc est le ou les trustees, ceux chargés d’administrer le trust. On imagine le nombre extraordinaire de combinaisons que permet l’emploi simultané du trust, de la société dont les actionnaires réels ne sont pas connus et enfin des comptes dont les propriétaires ne sont pas identifiés. Et ces combinaisons couvrent non seulement l’évasion fiscale mais également le blanchiment d’argent, les comptes d’organisations terroristes etc …

    Il est donc extraordinaire de voir des pays membres de l’OCDE parmi les plus fiables en matière de coopération fiscale et de lutte contre la fraude, les anglo-saxons en tête, condamner des dizaines de pays comme paradis fiscaux comme cela s’est produit à l’issue de la réunion du G-20 à Londres le jeudi 2 avril 2009, liste à l’appui, alors que c’est chez eux qu’en pratique, la fraude est la plus facile à pratiquer.

    Samuel-Frédéric Servière

    (Source IFRAP : http://www.ifrap.org/Quand-les-Etats-Unis-et-le-Royaume-Uni-agissent-comme-des-paradis-fiscaux,1178.html)

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    mardi 7 avril 2009

    Fiscalité : L'OCDE se veut moins sévère sur les paradis fiscaux

    A l’occasion d’une réunion conjointe avec la Commission européenne le 7 avril, l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a indiqué que la question du recours à des sanctions contre les paradis fiscaux n’était plus "pertinente".

    Après un entretien avec le commissaire européen à la Fiscalité László Kovács - qui a annoncé que la Commission va publier le 28 avril une communication sur les normes mondiales pour la bonne gouvernance en matière fiscale-le Secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria a déclaré : "le terme ‘sanction’ apparaît dans le communiqué du G20 mais franchement, notre objectif est que le mot ‘sanction’ reste là et se fane, et ne soit jamais utilisé".

    Auparavant, le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, s’était plaint que son pays reste sur la liste "grise" de l'OCDE des centres financiers qui ont promis mais pas encore mis en application l’échange normalisé d’informations fiscales.

    (Source : http://www.europolitique.info)

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    lundi 6 avril 2009

    La liste des paradis fiscaux du G20 suscite perplexité et polémique

    La liste de paradis fiscaux pouvant être sanctionnés à l'issue du G20 suscite perplexité et polémiques de la part des petits pays européens visés. Reste aussi à déterminer les sanctions applicables.

    La publication de listes « noire » et « grise » de pays insuffisamment coopératifs en matière de lutte contre l'évasion fiscale et susceptibles d'encourir des sanctions a été saluée comme un accomplissement essentiel du G20 de Londres, jeudi, et qualifiée même de « bénédiction » par l'ONG Transparency international. Mais les critères de sélection s'avèrent, aux yeux de leurs détracteurs, à peu près aussi opaques qu'un compte bancaire aux îles Caïmans. Ce qui a suscité ce week-end une levée de boucliers de certains pays européens mis à l'index, Belgique, Suisse et Luxembourg, scandalisés d'être associés à des paradis bancaires notoires, et qui soulignent que les grandes puissances vertueuses ne sont pas les dernières à pratiquer le secret bancaire.

    Ainsi, « ça fait un peu sourire, en Belgique, de voir que les îles Anglo-Normandes sont considérées, tout comme les îles Vierges américaines, comme n'ayant aucun problème », a ironisé le ministre belge des Finances, Didier Reynders, dont le pays figure sur la liste « grise » des 42 pays ayant certes pris des engagements mais restant sous surveillance jusqu'à ce qu'ils les ait appliqués « substantiellement ».

    Proximité géostratégique

    En effet, les trois listes de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) auquelles renvoie le G20 peuvent provoquer une certaine perplexité. En apparence, les critères sont clairs. Figurent sur liste blanche les Etats transparents sur le plan fiscal. Sur liste grise, 41 Etats ayant pris l'engagement de respecter le principe de l'OCDE de ne plus opposer le secret bancaire aux enquêtes fiscales, mais n'ayant pas encore signé 12 conventions bilatérales d'échanges d'informations. Et sur liste noire, trois Etats (Costa Rica, Malaisie, Philippines) qui n'ont pris aucun engagement. Mais ces critères sont-ils appliqués en fonction de la proximité géostratégique avec telle ou telle grande puissance du pays visé ?

    Certes, le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria, s'en défend (lire ci-dessous). Mais, Macao et Hong Kong ont obtenu de ne figurer sur aucune liste, à l'issue d'une négociation entre Pékin et Paris arbitrée par Washington, alors qu'ils pratiquent autant le secret bancaire que des pays classés sur liste noire. De même, souligne Philippe Bouchez el-Ghozi, avocat au sein du département contentieux du cabinet américain d'avocats Paul Hasting, « les lois protégeant l'identité des ayants droit économiques d'une société domiciliée au Delaware, au Nevada, à Jersey ou à Londres permettent de contourner efficacement les règles limitant le secret bancaire sur le plan fiscal ».

    Chausse-trapes procédurales

    Un contribuable voulant échapper au fisc trouverait toute facilité sous le régime des trusts, fondations et autres fiducies à Chypre et Malte (sur liste blanche) ou à Jersey et Gibraltar. Philippe Bouchez el-Ghozi ajoute qu'en pratique, dans un pays sur liste blanche comme les Etats-Unis, les chausse-trapes procédurales peuvent être si nombreuses que le fisc d'un autre pays aura le plus grand mal à obtenir la moindre information (il est vrai que les Etats-Unis, comme nombre de pays européens, font valoir que le secret bancaire demeure un instrument vital et légitime pour protéger le secret des affaires, notamment dans des secteurs sensibles, aéronautique, armement). Enfin, est-il justifié de mettre dans la même catégorie, en liste grise, des pays comme la Suisse et la Belgique, qui appliquent depuis longtemps les standards de l'OCDE en matière de lutte contre le blanchiment d'argent ou qui ont annoncé récemment leur intention de lever le secret bancaire sur le plan fiscal, et des pays comme le Panama, Monserrat, Nauru, les Bermudes, les îles Vierges, qui étaient et sont peut-être encore impliqués dans le blanchiment d'argent et qui, ayant pris l'engagement d'appliquer le standard de l'OCDE en 2001, n'ont rien fait depuis ?

    Toujours est-il, quelles que soient les retombées de la polémique, que se profile toute une panoplie de sanctions que les membres du G20 pourraient prendre contre les pays n'ayant pas signé le nombre requis de conventions d'ici à septembre. Ce serait la première fois que des sanctions internationales seraient prises contre des pays complaisants en matière d'évasion fiscale. Jusqu'ici, tout ce qu'ils risquaient était une mauvaise réputation.

    Sont à l'étude des retraits de licences bancaires, la taxation des transactions avec les paradis fiscaux ou l'augmentation des ratios de fonds propres appliqués aux établissements financiers poursuivant leurs relations avec des pays non coopératifs. Le paradoxe étant qu'une telle punition aurait, avant la crise mondiale, rendu en réalité service aux établissements fautifs, puisque la crise a surtout déstabilisé les banques imprudentes en matière de provisions.

    YVES BOURDILLON, Les Echos
    (Source "Les échos" : www.lesechos.fr/patrimoine/impots/300341124-paradis-fiscaux-la-liste-du-g20-suscite-perplexite-et-polemique.htm) Lire la suite...

    dimanche 5 avril 2009

    Sarkozy revient du G20, les (faux) patrons lui disent merci

    Un comité d'accueil composé de chefs d'entreprises du CAC 40 attendait Nicolas Sarkozy à son arrivée de Londres le 2 avril dernier par l'Eurostar pour célébrer l'absence de régulation de leurs activités.

    Cette parodie présente des multinationales soulagées que le G20 ne se soit pas attaqué au renforcement des régulation de leurs activités.

    Cette action, à l'intiative d'Oxfam France - Agir ici et du CCFD-Terre solidaire, a été faite dans le cadre de la campagne « Hold up international » qui appelle les citoyens à se mobiliser pour pousser à une réforme du cadre juridique européen, afin de limiter l'impact négatif des multinationales et faire que leurs actions profitent aux populations du Sud en contribuant au développement de leur pays.

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    samedi 4 avril 2009

    Interview d'Angel Gurria, secrétaire général de l'OCDE


    "Celui qui veut frauder n'aura nulle part où se cacher"

    Londres, jeudi 2 avril, les dirigeants des vingt principales puissances économiques sont parvenus à un accord visant à mettre fin aux dérives des paradis fiscaux. Il passe par la publication d'une liste noire de pays non coopératifs établie par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), bientôt assortie de sanctions. Il constitue, dans l'esprit du G20, la première pierre d'une refondation globale du système financier international, axée sur la transparence.

    Dans un entretien au Monde, le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria, déclare qu'il s'agit d'une "avancée historique". Pour la première fois, pays développés et émergents s'entendent pour faire de la chasse aux Etats qui favorisent l'évasion fiscale et le blanchiment d'argent une priorité. Le plan d'action adopté à Londres est, selon l'OCDE, de nature à rétablir la confiance, donc à accélérer la sortie de la crise.

    Quelle est la portée de l'accord du G20 sur les paradis fiscaux ?

    Les avancées sont réellement historiques. On a progressé en deux semaines plus qu'au cours des dix dernières années ! Sans ce sommet de Londres, où la question a été très tôt inscrite à l'ordre du jour, nous n'aurions jamais obtenu l'engagement de la quasi-totalité des paradis fiscaux à coopérer avec l'administration fiscale et la justice. Hongkong, Singapour, Macao, le Liechtenstein, La Suisse, la Belgique, l'Autriche, les Iles Vierges... Une vingtaine d'Etats susceptibles d'apparaître sur la liste des pays non coopératifs nous ont appelés pour s'engager à modifier leurs lois.

    La refondation ne sera pas seulement économique. Elle sera morale et éthique. Bientôt, celui qui veut frauder n'aura nulle part où se cacher.

    En quoi les listes que vous publiez, à la demande du G20, l'une "noire", l'autre "grise", serviront-elles la lutte contre ces trous noirs de la finance ?

    L'OCDE étant une organisation daltonienne à cet égard, plutôt que de parler de couleurs, on préfère des critères précis et objectifs en matière d'échange d'informations fiscales. On distingue trois types de juridictions : celles qui appliquent les standards de l'OCDE ; celles qui se sont engagées à le faire ; et celles qui ne l'ont pas fait. Je suis persuadé que les deux dernières sont appelées à disparaître vite. J'ai parlé, le 2 avril, au ministre des finances de l'Uruguay (l'un des quatre pays qui avaient été inscrits sur la liste "noire", avec les Philippines, la Malaisie et le Costa Rica).

    Eh bien vendredi, il nous a adressé son engagement formel à échanger de l'information. Ce pays vient donc de basculer... dans le camp de ceux qui s'engagent à coopérer !

    Pourquoi la liste "noire" est-elle si restreinte, alors que l'argent blanchi ou soustrait à l'impôt porte sur des sommes énormes ? Aux Etats-Unis, l'évasion fiscale représenterait 100 milliards de dollars par an...

    Parce que de plus en plus de pays s'engagent à coopérer, et en sortent. L'enjeu désormais, c'est de veiller à ce que les engagements soient tenus. Nous allons aider les pays à appliquer nos règles, et les surveiller, pour qu'aucune déclaration ne reste lettre morte. C'est assez facile, puisque nous sommes alertés dès qu'un pays se voit refuser des informations dans le cadre d'une enquête fiscale.

    Pourquoi ne pas l'avoir fait avant ? Des promesses d'il y a dix ans n'ont pas été tenues...

    C'est vrai, le Panama, par exemple, avait promis d'évoluer en 2002. Rien n'a été fait en huit ans. Nous avons toujours tenu nos membres au courant des avancées et des blocages. A présent, ils devront nous dire si des engagements qui ne sont pas suivis d'effets doivent rester valables.

    Pourquoi la Chine ou la Russie, critiquées pour leur opacité, ne sont-elles pas sur la liste "noire" ?

    Pékin, comme Moscou, a adhéré sans problème aux critères de l'OCDE. La Chine coopère aussi bien que la France ou l'Australie. Le problème portait sur ses régions administratives autonomes - Macao et Hongkong - qu'elle a finalement poussées à s'engager dans la voie de la coopération.

    Quid du Royaume-Uni, qui a sous son pavillon Jersey et Guernesey, et abrite de nombreux hedge funds ? Quid des promesses de la Suisse ou du Luxembourg, qui ont bâti leur industrie financière sur le secret bancaire ?

    Demain, la transparence sera la règle. Il y a une volonté politique de construire une économie plus forte, plus propre et plus juste, de mettre fin à la face obscure de la globalisation. Les comportements suivront.

    Pour la première fois, la Chine a accepté de faire référence à l'OCDE, dont elle n'est pas membre. Y fera-t-elle son entrée ?

    Nous avons invité la Chine, avec le Brésil, l'Inde, l'Indonésie et l'Afrique du Sud, à renforcer ses liens avec l'OCDE, en vue d'une éventuelle adhésion. Nous travaillons de plus en plus étroitement avec elle. Nous lui fournissons des rapports économiques, elle participe à nos comités. Nous sommes disposés à faire plus et sommes ouverts à une éventuelle adhésion. La décision est entre ses mains.

    Propos recueillis par Anne Michel pour Le Monde (édition du 05.04.09)

    (Source "Le Monde") Lire la suite...

    Paradis fiscaux : la liste noire disparaît

    Les quatre pays de la liste noire des paradis fiscaux non coopératifs - Philippines, Malaisie, Costa Rica et Uruguay - rendue publique lors du G20, ont tous été retirés, après avoir pris l’engagement de se conformer aux normes fiscales internationales. Ils rejoignent les 38 autres pays inscrits sur la liste grise également publiée lors du G20. Un retrait qui laisse perplexe sur la réelle volonté politique de lutter contre la finance « off shore ».

    L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui a établi les différentes listes des paradis fiscaux selon leur degré de « coopération fiscale », s’est félicitée, mardi 7 avril, des « engagements pris » et des « progrès rapides » réalisés par les pays figurant sur sa liste noire. Les Philippines, la Malaisie, le Costa Rica et l’Uruguay se sont en effet engagés « dès cette année » à échanger des renseignements fiscaux avec les autres états membres de l’OCDE, annonce qui leur a permis de rejoindre la « liste grise » regroupant les "juridictions qui se sont engagées à se conformer à la norme fiscale internationale mais ne l'ont pas encore effectivement appliquée", selon l'OCDE. Dans cette liste grise figurent notamment la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, le Lichtenstein, l’Autriche ou encore Monaco, qui figurait encore récemment sur la liste noire.


    Si Transparency France - membre de la Plateforme des paradis fiscaux et judiciaires - s’est félicitée de la publication de ces listes en soulignant «
    l’avancée historique dans la mise au pas des paradis fiscaux », l’ONG estime que « la bataille est cependant loin d'être terminée ». « La volonté de la communauté internationale de mettre fin aux abus des paradis fiscaux ne sera réelle que si des actes concrets sont mis en œuvre avant la prochaine réunion du G20 en septembre 2009. Un dispositif de suivi et de contrôle géré par les institutions internationales doit ainsi être mis en place afin de vérifier l'avancement des décisions prises à Londres », prévient Transparency.

    Des paradis fiscaux qui restent cachés

    En dehors de la question posée sur la réalité de ces engagements, un autre aspect suscite la perplexité : plusieurs paradis fiscaux ne figurent sur aucune liste, à commencer par la City à Londres, ou encore les états américains du Delaware (qui regroupe à lui seul 43% des sociétés cotées en Bourse à New-York) et du Nevada. De même, Chypre, Jersey (classé 3ème paradis fiscal le plus nocif d’Europe par la Plateforme des paradis fiscaux), la Barbade (qui défiscalise les exportations américaines) ou encore l’île Maurice figurent sur la «liste blanche» de l’OCDE, qui regroupe les pays « respectant les normes internationales »…

    Rappelons que l’Europe elle-même compte une douzaine de territoires présentant toutes les caractéristiques des paradis fiscaux et judiciaires. « La France utilise Andorre et Monaco, voire la Suisse, les Britanniques les îles Anglo-Normandes avec leurs 225 banques et leurs 820 fonds d'investissement, et les territoires (ou ex-) de la Couronne répartis à travers le monde, les Italiens, la principauté de Saint-Marin, etc », indique la Plateforme des paradis fiscaux et judiciaires. Enfin, Hong Kong et Macao ont également échappé à la liste noire, la Chine ayant fait pression en ce sens sur le président Obama lors du sommet du G20.

    Pour Oxfam France - Agir ici, les listes de paradis fiscaux publiées par l'OCDE "ne sont pas l'outil attendu", mais seulement "des listes de bonnes intentions". "La décision prise par les dirigeants du G20 de publier de telles listes était pourtant un point de départ nécessaire: sans liste, aucune sanction possible", poursuit l'ONG dans un communiqué. L’ONG regrettait à l’issue du G20 que "quatre pays seulement figurent sur la liste noire ". Quatre jours plus tard, la fameuse « short list » n’existe plus…

    "S'attaquer aux entreprises elles-mêmes"

    En permettant la circulation incontrôlée des capitaux spéculatifs, les paradis fiscaux sont largement responsables de la crise financière actuelle. Vont-ils pour autant disparaître un jour ? Rien n’est moins sûr, selon des experts comme Eva Joly ou Jacques Attali. Ce dernier a estimé sur France Info que l’initiative du G20 n’aboutirait « qu’à un déplacement de l’argent dans d’autres endroits ». Quant à l’ancienne magistrate, la seule mesure efficace consisterait selon elle à s’attaquer aux structures juridiques et aux trusts, qui permettent de cacher l’identité de leurs bénéficiaires, ainsi qu’aux multinationales qui possèdent des filiales implantées dans les paradis fiscaux, en les obligeant à rendre des comptes sur ces implantations. « A condition qu’il y ait une volonté politique, des mesures peuvent être prises sur le champ », a-t-elle expliqué dans l’émission « Ce soir ou jamais » sur France 3 le 7 avril. « Les gouvernements peuvent contraindre les entreprises cotées à dire où elles font des bénéfices, et où elles payent des impôts, au lieu de les laisser transférer leurs résultats dans des filiales off-shore ».
    2,4 millions de sociétés-écrans étaient présentes en 2000 dans les paradis fiscaux, selon l’étude d’Oxfam «The hidden billions for development». Récemment, une enquête d’Alternatives économiques (voir article lié) révélait que toutes les entreprises du CAC 40 «
    y sont implantées, avec pratiquement 1 500 filiales offshore, réparties sur près d’une trentaine de territoires, des Bermudes à la Suisse en passant par Malte, Panama et… le Royaume-Uni », expliquait l’enquête.

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    Paradis fiscaux, des listes bien pâles

    Fraude. Fruit d’une négociation diplomatique serrée, la nouvelle classification s’avère laxiste

    Question piège : qui sont les trois pays considérés comme les plus grands paradis fiscaux selon le G20 ? Sont-ce les îles Caïman, la Suisse, les Bermudes (les principaux centres financiers offshore de la planète) ? Pas du tout. Les nouveaux pestiférés de la finance mondiale ont pour nom Costa Rica, Philippines, île de Labuan (une zone franche de la Malaisie), l’Uruguay ayant été retiré de cette liste vendredi soir, 24 heures après que l’OCDE eut établi celle des pays «fiscalement non coopératifs», c’est-à-dire qui n’ont pas (ou pas encore) signé au moins 12 conventions de coopération avec d’autres pays membres de l’organisation.

    Pour le coup, c’est une surprise. Les trois pays figurant sur cette «liste noire» se voient reprocher de n’avoir pris «aucun engagement de se plier aux standards internationaux sur le plan fiscal». Quant aux principaux centres offshore connus, l’OCDE les cite, mais sur une «liste grise» à part, qui inclut les pays ayant pris des engagements, mais ne les ayant pas «substantiellement» mis en œuvre. Et certains territoires, comme Jersey ou la Barbade, ont même eu le plaisir de faire partie de la «liste blanche», aux côtés de la France et des principaux pays de la planète. Du coup, l’initiative du G20 contre le secret bancaire et les paradis fiscaux s’en est trouvée de beaucoup relativisée.

    Déconseillée. Les accusés présents sur la première liste noire, d’abord, font pâle figure. «Ils doivent leur présence sur cette liste avant tout à l’absence de défenseur autour de la table du G20», juge ainsi Jean Merckaert, du Comité catholique contre la faim et pour le développement. Exemple, l’Uruguay. Longtemps connu en Amérique du Sud pour son secret bancaire et sa législation accommodante, la destination est maintenant déconseillée par tous les spécialistes de l’évasion fiscale. Le gouvernement vient de supprimer les sociétés anonymes d’investissement financier.

    Autre doute quant à l’efficacité du procédé, le nombre de pays présents sur la liste grise à se déclarer pas mécontents. Si du côté de la Suisse, on «déplorait» vendredi «le procédé» et «les critères qui ont servi à établir la liste» (lire ci-contre), l’Autriche affirmait s’accommoder tout à fait d’être mollement pointé, ajoutant même que le «secret bancaire autrichien n’en serait pas affecté». Et à Monaco ou en Andorre, jusqu’à présent dans la liste noire, c’était le bonheur. «Le fait que l’Andorre soit dans la liste grise de l’OCDE est positif», déclarait le gouvernement andorran, tandis que son homologue monégasque se disait «satisfait» d’avoir quitté «une liste noire totalement obsolète». Résultat de ce manque de fermeté du G20, des ONG partagées. «Nous sommes très satisfaits qu’il existe désormais ces listes, a ainsi fait savoir vendredi Transparency International. C’est une bénédiction.» Mais pour Oxfam France, «les listes de paradis fiscaux publiées ne sont pas l’outil attendu. La liste des pays censés respecter "substantiellement" les standards de l’OCDE est étonnamment longue».

    «Décrédibilisée». Explication de cette demi-déception, la négociation diplomatique a été très serrée. A l’origine, de nombreux pays, comme la Chine, ne voulaient pas entendre parler du concept même de liste. Et, pour obtenir un résultat, les partisans d’une mise au ban des paradis fiscaux ont dû faire de nombreuses concessions. «Après tout ce qu’il avait promis, Sarkozy ne pouvait pas sortir de ce G20 sans liste noire. Du coup, il a laissé paraître une liste décrédibilisée», estime Jean Merckaert. Ainsi, pour ne pas fâcher la Chine, Macao ou Hongkong ont été effacés des listes et ne sont plus désignées, dans une note, que comme «région administrative spéciale».

    Par rapport à sa position initiale, la France a aussi reculé en acceptant de laisser seulement à l’OCDE le soin de désigner les bons et les méchants paradis. Pour Oxfam, d’autres logiques, comme celle du Gafi (Groupe d’action financière), qui s’intéresse au blanchiment, ou celle du Forum de stabilité financière, attentif à la surveillance des marchés financiers, auraient sûrement donné une image plus complète de la dangerosité des places offshore. Ainsi, si l’on avait tenu compte de la spécialité de Jersey, le Trust, une entité juridique permettant de dissimuler ses véritables propriétaires, l’île anglo-normande ne se serait peut-être pas retrouvée sur la liste blanche… De toute façon, ces listes ne servent pas à grand-chose sans sanction. Et, sur ce point, le G20 a promis qu’il allait passer aux actes. Tout reste donc à faire.

    NICOLAS CORI, Libération

    (Source "Libération" : http://www.liberation.fr/economie/0101560153-paradis-fiscaux-des-listes-bien-pales)

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    vendredi 3 avril 2009

    Les "paradis fiscaux" se rebiffent

    Le Luxembourg, la Suisse ou encore le Liechtenstein ont réagi vendredi à leur inscription sur une liste "grise" de paradis fiscaux, dans le sillage de l'offensive lancée par le G20 contre les pays pratiquant "le secret bancaire". L'Uruguay, qui figurait sur la liste noire, en a été retiré vendredi soir par l'OCDE, après l'adoption de nouvelles normes de transparence.

    "Je trouve le traitement (...) réservé à certains Etats un peu incompréhensible". Le Premier ministre du Luxembourg, Jean-Claude Juncker, ne cache pas sa colère, après l'inscription de son pays sur une liste de paradis fiscaux, publiée par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans la foulée du G20 de Londres.

    Suisse, Autriche, Belgique, Liechtenstein, Monaco, les Bermudes ou les îles Caïmans : selon l'OCDE, ces Etats, qui figurent sur la partie "grise" de la liste, se sont certes engagés à respecter les critères internationaux en matière de transparence bancaire et fiscale mais ne les ont pas "substantiellement" appliqués.

    La Suisse a "déploré" de son côté son inscription sur la liste de l'OCDE et "désapprouvé le procédé". Les autorités du Liechtenstein ont indiqué pour leur part vendredi avoir désormais pour "objectif de ne plus figurer sur cette liste grise". Le ministre autrichien des Finances Josef Pröll continue à assurer que le secret bancaire autrichien ne serait pas pas "affecté", alors que les dirigeants du G20 estimaient que "l'ère du secret bancaire est terminée".

    Autre critique portée par Jean-Claude Juncker : le fait que les Américains ont échappé à tout reproche. Mardi à Bruxelles, devant le Parlement européen, Jean-Claude Juncker avait nommément cité le Delaware, le Wyoming et le Nevada comme des paradis fiscaux, en raison de leurs fiscalités très faibles pour les entreprises.

    La ministre française des Finances Christine Lagarde a quant à elle indiqué que les pays du G20 allaient à présent "travailler" sur des sanctions pour "les centres non coopératifs qui ne se mettent pas aux normes".

    L'Uruguay, inscrite sur la liste noire de l'OCDE, en a été retiré vendredi. "L'OCDE salue aujourd'hui (vendredi) l'adoption formelle par l'Uruguay des normes de transparence et d'échange d'informations en matière fiscale", indique l'organisation économique. Le secrétaire général de l'OCDE s'est déclaré heureux que Montevideo "se joigne au nombre grandissant de pays désirant coopérer pour combattre l'évasion fiscale".

    > Ecoutez le reportage à Genève, la "ville aux 142 banques", où les habitants vivent mal leur mise au ban de la communauté internationale.

    (Source Europe 1)

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    jeudi 2 avril 2009

    Face à la crise, la société civile européenne s'organise

    Cent cinquante représentants des mouvements sociaux, des syndicats, des ONG environnementales, du développement, des droits des femmes, et d’autres mouvements sociaux, venant de vingt-cinq pays, se sont réunis à Paris du 9 au 11 janvier pour s’organiser face aux crises financière, économique, sociale et écologique.

    Parmi les participants étaient notamment présents l’AITEC, les Amis de la Terre Europe, ATD Quart Monde, le réseau des Attac d’Europe, le CCFD, le CRID, la Ligue des droits de l’homme,
    Oxfam France – Agir ici, le Secours catholique, Via campesina Europe, les syndicats CGIL, CGT, FSU, Solidaires, Ver.di…

    De cette réunion est sortie une déclaration (La Déclaration de Paris) qui appelle à faire du G20 de Londres, le 2 avril, un grand moment de mobilisation en Europe, autour du mot d’ordre « Nous ne paierons pas pour votre crise ».

    Le 28 mars (le samedi précédant le G20), s’est tenue une journée internationale de manifestations et d’actions pour de véritables alternatives, en écho à la manifestation qui se déroulera le même jour à Londres.

    Cette mobilisation s’est ensuite poursuivie jusqu’au G20 par une semaine d’actions partout en Europe, et notamment, le 1er avril, par une journée « poisson d’avril de la finance ». http://www.financialfoolsday.com/

    C'est également à cette occasion qu'Oxfam France - Agir ici et le CCFD-Terre solidaire ont lancé leur campagne "Hold-up international", pour lutter contre l'impunité des multinationales.

    Le 2 avril, alors que se déroulait le G20 à Londres, les militants des deux organisations, déguisés en patrons du CAC40, formaient un comité d'accueil festif et parodique en attendant Nicolas Sarkozy en Gare du Nord (Paris).

    > En savoir plus et voir la vidéo


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    mercredi 1 avril 2009

    REPORTAGE - Paradis fiscal "à l'ancienne", Jersey estime ne pas avoir de comptes à rendre

    Karl Marx aimait se promener sur les plages et falaises de Jersey pour oublier, disait-il, la misère avilissante de la classe ouvrière londonienne. Robert Kirby, directeur technique de Jersey Finance, porte-parole du secteur financier jersiais, aime rappeler cette anecdote face à la tempête que provoque le G20 dans ce centre offshore posé à quelques encablures de Cherbourg (Manche). Placés sous l'autorité du suzerain anglais, ces fiers insulaires ont été choqués par les attaques du premier ministre Gordon Brown contre les "paradis fiscaux à l'ancienne qui n'ont pas de place dans le monde d'aujourd'hui".

    Jersey n'a de leçons à recevoir de personne, souligne M. Kirby en dénonçant "la rhétorique aveugle de l'économie de la rage". A écouter cette vigie du libéralisme, en ces temps de crise financière, les 47 succursales de banques, britanniques comme étrangères, installées à Saint-Hélier collectent des dépôts acheminés ensuite vers leur maison mère. En clair, les fonds collectés finissent dans les coffres de New York, Londres ou Paris, pas dans les boyaux de l'ancien hôpital souterrain creusés dans la roche par des déportés russes lors de l'occupation allemande de l'île anglo-normande.

    Nulle onction dans l'éloquence de Stephen Platt : les aigus de sa voix ne le lui pardonnent pas. Le président du cabinet d'avocats Bakerplatt en appelle le doigt pointé à la conscience morale du tribunal du G20 comme du jury de l'opinion internationale : "Nous vivons dans une économie mondialisée et libre dont l'un des fondements est la concurrence fiscale légitime entre Etats."

    Mais pourquoi les riches choisissent-ils de mettre leur argent dans ces îles anglo-normandes où tout n'est qu'ordre, beauté, calme et volupté ? "Aux yeux de mes clients, la fiscalité importe moins que la tranquillité d'esprit. La confidentialité protège les grandes fortunes des kidnappeurs et des cambrioleurs", insiste un gestionnaire de patrimoine ayant pignon sur rue.

    PRATIQUES OPAQUES

    Ces pratiques opaques sont fustigées par le réseau de recherche fiscale Tax Justice Network (TJN) qui a organisé une manifestation, le 13 mars, devant plusieurs banques de Saint-Hélier. Ce bras de fer entre seigneurs de l'argent et militants se double d'une aimable comédie de Clochemerle. Car l'homme par qui le scandale arrive, le directeur du TJN, John Christensen, est un enfant du pays, ancien régulateur de la Jersey Financial Commission. Son frère, Robert, est un financier respecté, spécialiste du montage de trusts. "John est motivé par le sentiment de revanche. Il rêvait de diriger le régulateur, mais n'avait pas les compétences nécessaires. C'est un traître à la nation", proclame, courroucé, un professionnel lui aussi natif de l'île.

    Reste que dans le contexte du G20, la campagne de John Christensen, touche un nerf sensible. Le croisé de la transparence remet en question le poids écrasant de la finance dans l'économie locale - la moitié du produit intérieur brut. Sans parler de l'avenir des liens séculaires et jusque-là harmonieux entre Jersey et Londres.

    Marc Roche

    (Source "Le monde.fr")

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